Irma Grignon-Faintrenie (1873-1966)
Née à Paris, son père est secrétaire d’une compagnie mutualiste. La famille Faintrenie s’installe à Lyon, cours Gambetta (7e), en 1889, puis rue Auguste-Comte (2e). Irma suit au Conservatoire les cours de diction dramatique de Dalbert. Elle se produit à partir de 1895 sur la scène des Célestins où elle déclame des poésies et organise des galas de charité. Elle donne des cours de diction et de déclamation à des jeunes filles. Elle épouse M. Grignon en 1898, dont elle aura deux filles. M. Grignon disparait en 1917.
Irma décide de créer un lieu culturel, une « maison de la culture » et loue pour cela un appartement 24 rue Confort – aujourd’hui rue Louis-Paufique - à l’angle de la rue de la République.
La Maison et l’Université des Heures (1917-1964)
Madame Grignon-Faintrenie fonde la Maison des Heures en 1917, sur le modèle de l’Université des Annales d’ Yvette Sarcey-Brisson. « Les Heures » renvoie à un poème de Xavier Privas, poète lyonnais (1863-1927). Irma choisit un cadran solaire comme emblème, qui figure sur les programmes.
Edouard Herriot n’accordera pas de subvention aux Heures, mais témoigne dès l’origine d’une grande bienveillance pour le projet, n’hésitant pas à payer de sa personne par des conférences. De nombreuses personnalités lyonnaises accordent leur soutien à l’entreprise : Edmond Locard, Ennemond Trillat, Robert Proton de la Chapelle, Pierre Combet-Descombes, Paul Duvivier…
Madame Grignon-Faintrenie joue le rôle d’impresario pour de nombreux artistes de l’époque. Pour recruter les artistes et les spectacles et donc construire le programme de chaque saison, Irma va choisir à Paris des troupes et des orchestres et signe des contrats avec leurs impressarii. Les conférences ont lieu au 24 de la rue Confort et Mme Grignon-Faintrenie loue également des salles, salle Rameau, les Célestins, la salle Molière.
La programmation des Heures est prestigieuse et beaucoup d’artistes doivent à Irma leur première à Lyon. Ravel avec La Valse ; Arthur Rubinstein qui interprète l’arrangement pour piano du Ballet de Pétrouchka par Igor Stravinski, une pièce très difficile, pour la première fois à Lyon ; des danseurs comme Jeanne Ronsay, Lisa Duncan, Anita Wiskeman. Une autre innovation est la prolongation de la saison musicale au-delà du mois de mars en 1928, avec les « Heures de printemps » et ce grâce à l’intervention d’Edmond Locard : jusqu’à présent, dès mars, théâtres et opéra fermaient jusqu’à l’automne.
Les Heures favorisent dans les années 1930 la renaissance de la musique baroque avec le 1er février 1926 un festival de musique où Lulli est à l’honneur.
Une programmation prestigieuse… et courageuse : le 20 mai 1942, Irma Grignon-Faintrenie invite l’orchestre de l’Association philarmonique de Lyon à un grand concert de musique française, dirigé par Paul Paray avec au programme Ravel, Franck, Chabrier, Paray. L’orchestre joue la Marseillaise en clôture. Cette représentation a lieu 48 heures après un concert de propagande du Philarmonique de Berlin, boycotté par le public lyonnais.
Mais les Heures sont aussi un conservatoire miniature. L’Université des Heures est ouverte à tous pour une « somme acceptable », même si elle fréquentée par une élite intellectuelle bourgeoise. On y enseigne la musique, le chant choral, la danse, la déclamation, les arts graphiques, la couture, le dessin, la décoration, l’orgue… pour adultes, enfants, adolescents. Ainsi à partir de 1934, les Jeudis classiques accueillent les lycéens sur le programme du baccalauréat (Racine, Molière…) pour jouer et commenter les œuvres. Les classes ont un examen trimestriel et le concours de fin d’année est organisé avec remise des diplômes. Les élèves peuvent ensuite présenter le concours du Conservatoire.
A la Libération, les Heures reprennent leur activité. Mme Grignon-Faintrenie met un terme aux Heures en 1964, avec un concert de Wilhelm Kempff à la salle Rameau – Haendel, Schumann, Beethoven… - à l’âge de 90 ans.