Dessiner, caricaturer le corps
Les corps idéalisés des sculptures hellénistiques ont longtemps été un idéal de beauté. Les intentions qui accompagnent la représentation du corps le façonnent : on peut vouloir l’idéaliser comme les néo-classiques, l’enlaidir comme les romantiques ou le représenter avec réalisme. Les mœurs définissent aussi ce qui est acceptable de représenter ou non, les nouvelles représentations du corps choquant souvent les contemporains.
D’après Aristote, philosophe de l’Antiquité grecque, il existe 3 formes de représentations, portées par trois peintres : Plygnote embellissait, Dionysos peignait à l’identique et Pauson enlaidissait ses modèles. La relation entre spectacle de comédie et représentation graphique est étroite, les deux appréciant jouer autour des expressions faciales et de l’absurde. Au Moyen-Âge, il existait beaucoup de représentations grotesques, ou caricaturales qui se répandaient sur une variété de supports (vitraux, peinture, manuscrit).
La dissection des corps à l’époque du Moyen-Âge et de la Renaissance, a permis une nouvelle compréhension du corps humain et a indéniablement marqué l’histoire de l’art. La médecine et l’imaginaire qui l’entoure ont toujours eu une influence sur la façon dont on représentait et dessinait les corps. Avec ce nouveau savoir, le genre du portrait se développe à la Renaissance. Les peintres flamands vont à contre-courant de la vision idéalisée du corps qui se répand dans le reste de l’Europe. Willem pour sa part a beaucoup puisé son inspiration dans les livres de son père médecin, portant aussi bien sur l’anatomie que sur les maladies du corps. Comme il le dit lui-même : « Farfouiller dans les entrailles, j’aime ça ».
Focus sur la physiognomonie : elle découle de la théorie antique des quatre humeurs. Le corps serait composé de 4 éléments, en équilibre dans le corps de la personne. Ces éléments définissent des tempéraments : le feu pour le colérique, la terre pour le mélancolique, l’eau pour le flegmatique et l’air pour le sanguin. Personnalité et corps seraient donc liés, ce qui encourage le développement de la physiognomonie : le corps étant le miroir de l’âme, le caractère se traduit dans les traits du visage. Cette nouvelle conception du corps apporte avec elle de nouvelles représentations, hybridisant l’Homme, faisait correspondre ses traits à celui de l’animal qui coïnciderait à sa personnalité. Ainsi, les traits sont grossis et se diffuse une vision stéréotypée de l’être avec des traits caricaturaux. La caricature est faite ainsi de nombreuses influences, ainsi que l’a très bien compris Willem : son œuvre graphique en témoigne dans une large mesure.
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Art occidental : pourquoi autant de nus, pourquoi autant de culs ?
Géraldine Mosna-Savoye, Claire Maingon, le 05/01/2023
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Esthétique de la décomposition du corps
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Une rapide histoire de la caricature
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Apparue pour la première fois en français en 1740, la caricature est une image qui charge, exagère, déforme pour donner à rire et dénoncer. Si la pratique peut être retracée jusqu’en Egypte antique, elle se développe surtout à la période moderne, avec l’apparition de l’imprimerie, puis de la presse.
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