Le centre de ressources sur le Genre : le Point G

Qu’est ce que le genre ?

Plus personne n’ignore la célèbre phrase de Simone de Beauvoir « On ne naît pas femme, on le devient ».

C’est dans une toute autre sphère d’activité, qu’au cours de la décennie qui suivit (années 50), des médecins américains ayant pour patient-e-s des personnes transsexuelles et intersexuelles utilisèrent le terme « genre » pour parler de « sexe social ». Le protocole qu’ils élaborèrent mettait ainsi en avant le fait que la masculinité et la féminité sont des constructions culturelles indépendantes de la physiologie.

Pour être rapide, dans notre culture, les hommes apprennent idéalement à taire la souffrance, à se singulariser par la compétition, à vivre leur sexualité sur un mode pulsionnel, à développer des compétences techniques ou intellectuelles… Tandis que les femmes apprennent à se montrer sensibles et réservées, attentives à autrui, sentimentales et à développer avant tout des compétences jugées naturelles et peu qualifiées : maternage, soin, entretien, métiers de service. Il existe bien évidemment des exceptions et des évolutions, c’est même l’objet de notre propos. Aujourd’hui, c’est comme concept opératoire que le genre est exploité en sciences humaines. Il ne s’agit plus seulement « des genres » masculin / féminin, catégories circonscrites, mais « du genre » comme principe organisant la vie sociale.

Le genre sous-tend la notion d’orientation sexuelle. Sans genre, il n’y a ni hétérosexuel-le-s, ni homosexuel-le-s. Sous l’effet d’enjeux politiques complexes, nous sommes passés d’une réflexion morale sur les pratiques sexuelles à un discours sur la personnalité révélée par la sexualité (comme l’illustre bien la notion de « coming out »). Seules certaines pratiques déterminent un étiquetage identitaire ; d’autres pratiques ne sont qualifiées que de goûts. La caractéristique essentielle de l’identité sexuelle réside dans le sexe des partenaires. En effet, par homologie avec la biologie de la reproduction, féminité (apanage des femmes) et masculinité (apanage des hommes) sont conçues comme exclusives et complémentaires. L’hétérosexualité est donc très activement encouragée et valorisée. En revanche, l’homosexualité est stigmatisée et fait l’objet, selon les contextes, d’une tolérance, d’une réprobation morale ou d’une violente répression. Les insultes homophobes désignent généralement le manque de virilité chez les hommes, le manque de féminité chez les femmes.

Bien que les catégories qui constituent notre réalité ambiante nous apparaissent évidentes, l’histoire et l’ethnologie nous révèlent le caractère relatif de ces préceptes et normes. D’autre part, si femmes, hommes, transgenres, gays, lesbiennes, bisexuel-le-s, hétérosexuel-le-s… n’ont pas les mêmes prérogatives, elles et ils sont les produits d’un même système de représentations, les agents d’une même dynamique sociale. Cette dernière génère actuellement des zones de flou là où s’érigeaient récemment des frontières juridiques, intellectuelles, psychologiques...

C’est dans ce contexte que s’élabore le projet de la Bibliothèque municipale de Lyon. L’enjeu est de maintenir en tension la nécessaire visibilité des minorités (aspect social immédiat) et le questionnement des processus de construction identitaire (aspect plus intellectuel). On peut notamment se demander comment et pourquoi notre perception de l’altérité se fonde sur l’opposition binaire plutôt que sur la multitude ou la variabilité. Créer un centre de ressources sur le genre ayant pour focus la diversité sexuelle et la relativité des identités consiste donc également à renouveler les modalités de la connaissance. En donnant la parole à celles et ceux qui ne sont habituellement qu’objets du discours, c’est un savoir plus général qui se constitue.