Tremplin poétique
Retour de la Nuit au Bachut
En cette nuit du samedi 7 mai 2022, je trouve étrange de me rendre à la médiathèque du Bachut pour y passer la nuit. La situation est incongrue et exceptionnelle.
"Durant toute la durée du Tremplin Poétique, Alice, stagiaire au sein de la bibliothèque, se promène dans toutes les bibliothèques pour vous rapporter son expérience des ateliers et des rencontres poétiques auprès de Tania Tchénio".
A 00h00, tous les participant-es sont arrivé-es et nous nous retrouvons enfermé-es ensemble dans la bibliothèque vide et obscure. Tania Tchénio nous propose une petite visite des lieux pendant laquelle nous sélectionnerons un livre ami qui nous accompagnera durant cette nuit. Nous découvrons les différents espaces qui n’ont pas la même apparence au cœur de la Nuit. L’espace discothèque où résonne de la musique nous est accessible pour y créer une ambiance chaleureuse, tout comme l’auditorium où passe sur l’écran des extraits de films sur la nuit.
Puis nous remontons dans la salle d’animation où Tania nous donne différentes consignes d’écriture, assez inattendues, et entrecoupées de respirations pendant lesquelles chacun-e peut déambuler dans la médiathèque pour : aller regarder la nuit sur la terrasse, faire une petite sieste dans la section enfant, boire café ou manger un morceau, regarder un extrait dans l’auditorium… Chacun-e à son rythme s’empare de la nuit et des lieux pour vivre pleinement cette expérience et trouver l’inspiration. Lorsque je me balade dans les lieux, je n’aperçois presque personne et j’ai l’agréable sensation que la médiathèque m’appartient.
Lorsque pointe le petit jour, nous nous retrouvons tous pour échanger nos textes, nos impressions et partager un joli moment de convivialité autour d’un petit déjeuner. Finalement, malgré des petits moments de fatigue, la nuit est passée à toute vitesse et tout le monde repart avec de bons souvenirs.
Voir la vidéo de la Nuit au Bachut
Textes que cette nuit a inspiré
Texte 1 : Blackout poetry à partir d’un texte de « L’opulence de la nuit » de Charles Juliet
Nuit amie
Bonheur d’entrer
dans la nuit
l’être se love
en lui-mêmecoupées du temps
des heures légères
spacieusesLyon assoupie
dans le silence
amicale est la nuitla spirale me dépose
la où enfin
je peux me détendredans la tiédeur
de l’intime.
Eliz A
Texte 2 : Nuit intime
La dernière fois que j’ai dormi
je me suis blottie entre les draps
recroquevillée pour que ma tête
soit plus près de mes pieds
pour être au chaud et en sécuritéJe me suis lovée dans le silence
pour sombrer dans le noir du sommeil
ma tête posée sur l’oreiller
heureuse de trouver
un creux douillet pour s’apaiserLa dernière fois que j’ai dormi
j’attendais que le vent emporte
mes pensées parasites
de ce que j’avais fait ou
de ce que j’avais à faire,
j’attendais que la main
d’une fée les emportentmon cerveau et mes pensées
s’étaleraient comme
une mince couche de beurre
sur une tartine de pain chaud
me permettant de glisser avec délice
dans le sommeil,un sommeil dans lequel
mes rêves seraient déposés
des rêves comme des bulles
de savon apportées par une paille
ils m’emporteraient au-delà
des mers et de la terre
dans une aventure inconnueet si l’endormissement se fait attendre
rester là au cœur du silence
sans but à atteindre,
savourer ce moment de repos,
le silence et la pénombre
entre deux mondes
au seuil la porte des songes.
Eliz A
Texte 3
Le nuit caresse, sans l’ombre d’un doute, la couleur de ma peau et la fait virer au parme. C’est la fenêtre de la bibliothèque qui m’envoie ces quelques mots et me donne envie de marcher pieds nus sans nu-pieds... et comme quand le « Bas...a...chu », le « haut...aboie », une joie intérieure a voulu fêter haut et fort mes pieds « dans leur plus simple appareil ».
Elisabeth Immelé
Texte 4
Quand je te vois
Toi la nuit ventée
Qui souffle d’un lointain que j’ignore
Tu « m’immense » et m’émerveilleQuand je te sens,
Toi la nuit enrhumée
Qui se mouche dans les étoiles
Tu « merveilleuse » et me parfumesQuand je te palpe
Toi la nuit lumineuse
Ton grain de peau me touche en plein cœur
Et tu « m’inspirante » et m’aspireQuand je te goûte, toi la nuit savoureuse
Tes visages-nuages fêtent le peu d’étoiles de l’instant
Et tu me « délicieuse » et me rassasieQuand mes sens t’ouvrent leur porte, toi la nuit du 7 au 8 mai,
Tu mets les bouchées double pour m’envisager dans cet univers transdimensionnel.
Du coup, mes sens interloqués par tant de délicatesse
N’en finissent pas de s’interroger sur ta provenance et ta fin éphémère.
Cette éphémérité si touchante, mon corps en est imprégnée
Et chacun de mes pas en devenir, laisse la trace de nos regards croisés mémorables,
Comme si nous étions toi et moi nés d’un instant sans sommeil où le rêve faisait place à l’éveil...
Comme si nous vivions, à n’en pas douter, une des « Mille et Une Nuits » et que des soubresots de nos corps noctambules, jaillissait une douce brise féérique...comme si le vent décidait de chanter à tue-tête le silence enfoui.
Elisabeth Immelé
Texte 5
Chère Nuit,
Alors que l’aube sort de ses draps fleuris, je pense à toi.... Tendrement…. Car la dernière fois que j’ai dormi, j’ai oublié notre rendez-vous sur le quai près de l’étoile polaire...
Et oui, alors que d’habitude « je suis à l’Ouest », à ce moment-là, j’étais plein Sud, là où les nounours savent décoder le morse et du coup, je me suis assoupie en entendant la berceuse que ma « peau aime ».
A très bientôt dans ton univers,
Bises,
Elisabeth
Elisabeth Immelé
Texte 6
Cette nuit m’aura permis de faire face au miroir de mon regard qui reflétait, à n’en pas douter, une lecture réciproque des livres et moi....
En effet, alors que je lisais des passages de livres attrapés au hasard dans la bibliothèque cette nuit, j’ai senti du fond de mes tripes une autre lecture, celle des livres qui me lisaient. Oui oui, certains livres me lisaient et si les sons et les mots utilisés par ces livres m’étaient inconnus, ma peau, elle, déchiffrait à merveille leur intonation et percevait leurs interrogations car ils étaient rapidement devenus des compagnons. Pourquoi certains restaient dans mes mains et m’accompagnaient de Minuit à 5 heures du matin ? C’est une longue histoire semble-t’il entre l’arbre d’où naît le papier, le papier qui créé le livre et le livre que me choisit en un premier temps…puis qui me lit !!!
A n’en pas douter notre lien a vu le jour en pleine nuit, quand le silence lisait à voix haute ce que les étoiles du ciel pointaient du doigt. Du coup, c’est l’émerveillement qui a donné la cadence à notre danse poétique, dont les pas de deux alternaient avec les « passages » en solo. Nos tourbillons faisaient alors s’évaporer les mots qui partaient se fondre dans l’air ambiant de la nuit, d’heure en heure en pleine métamorphose...jusqu’aux premières lueurs d’une aube nouvelle.
Elisabeth Immelé
Texte 7 : Le rossignol inattendu
Dans les toilettes,
j’ai rencontré surprise,
un rossignol
il n’a pas chanté
mais il a déposé une goutte
de nectar sur mes mains tendues,
étonnée,
au lieu d’enchanter mes oreilles
il a satiné et nettoyé mes menottes,Etait-ce rêve ou réalité
la nuit à la bibliothèque
me laisse une saveur
exquise et surprenante
chargée de mystères.
Eliz A