Raymond Queneau par Jean-Pierre Martin
Jean-Pierre Martin,
le 13/04/2011
Aucune coquille ne s’est glissée dans ce dernier titre. En voici la preuve : « Qu’est-ce que la losophie ? Avec Raymond, vers la fin de son existence qui était l’orée de la mienne (je n’avais pas trente ans), à l’heure des bilans pour lui et des projets pour moi, nous avons créé un collège international de losophie. Nous étions les deux seuls membres, lui président, moi trésorier. Cette structure légère ne nous gênait aucunement, bien au contraire. Le collège de losophie ne se réunirait d’ailleurs, il faut bien le dire, jamais. Nous étions tous deux allergiques aux réunions, ça tombait bien. De plus nous étions loin de la parité. Ce qui n’a nullement empêché l’activité du « collège », comme nous disions modestement, de se déployer. On a beaucoup glosé sur la participation de Queneau à d’autres institutions, telles que le collège de pataphysique, ou encore l’ouvroir de littérature potentielle. Ce sont là des entités infiniment respectables, auxquelles Raymond Queneau a contribué avec toute la sincérité qui lui a été permise dans le cadre de l’adhésion officielle à un collectif, avec le petit malentendu mondain inhérent à ce type de participation. Mais je veux attirer l’attention sur le travail plus souterrain, plus secret, qui fut celui du collège international de losophie, association privée qui dans les dernières années nous a occupé tous deux, rien que nous deux. Ne voyons là nulle dissidence, nulle volte-face de dernière minute. Il faut simplement reconnaître que dans un dernier effort intellectuel autant que spirituel et grâce à mon aide, Queneau trouva une sorte de synthèse entre tous les Queneau dans lesquels il s’était tour à tour apparemment logé. » J.-P.M.
- Jean-Pierre Martin, écrivain et essayiste, est professeur de littérature contemporaine à l’université Lumière-Lyon 2, membre de l’Institut universitaire de France.